La BOP en WEC : Bêtise Ou Politique ?
Grotesque, ridicule, dégoûté, ennuyant, voici quelques retours de fans qui nous ont contactés à l'issue des 6H de Sao Paulo de ce dimanche.
Il est vrai que l'épreuve brésilienne ne fut guère excitante même si on a tout de même assisté à quelques belles passes d'armes. Le Français Julien Andlauer a mené la première heure de course et défendu corps et âme les couleurs de Porsche, tout comme d'ailleurs Michelle Gatting en fin d'épreuve face au retour du héros local Eduardo Barrichello pour la troisième marche du podium.
Pour le reste, on a assisté à une domination de Cadillac en Hypercar et de Lexus en LMGT3, une première dans les deux cas. Un résultat malheureusement assez prévisible à la lecture du tableau de la BOP, la fameuse Balance of Performances dont officiellement personne ne peut parler.
Cinq jours avant l'épreuve, on savait que les Cadillac, les Lexus, mais aussi les Peugeot et les Aston Martin Valkyrie seraient à leur avantage. Comment ne pas sourire quand on entend un pilote du Heart of Racing se réjouir des progrès effectués par son équipe ? Quelle valeur réelle encore accorder aux performances de chacun ? Franchement ?
Les vainqueurs du Mans à 2 tours
On savait aussi à l'avance que Ferrari, tant en GT qu'en proto, Toyota et BMW (en GT) seraient « garés ». Mais de là à voir les leaders du championnat et les champions constructeurs et tenants du titre à Sao Paulo à deux ou trois tours, il y a de la marge.
Ce n'est plus une punition (pour avoir trop caché leur jeu au Mans notamment), ce fut une véritable humiliation pour AF Corse et la Scuderia. Pire encore pour Toyota, seulement 14e et 15e, ou BMW avec les 10e et 12e places des M4 WRT au terme d'une exécution parfaite.
Comment expliquer que Ferrari et Alpine jouaient la gagne à Spa il y a deux mois et qu'ils jouaient ici la 8e place à deux tours ? Que Porsche était complètement à la rue avant Le Mans et soudainement mène le début de course ? Que BMW et Valentino Rossi survolaient la concurrence à Imola et pointaient à une seconde au tour ce week-end ? Que Cadillac a fait un podium en deux ans et demi en WEC et soudainement signe le doublé en qualifs comme en course ? Pareil pour Lexus en fond de grille il y a douze mois et dominante ce dimanche ? Et que dire de Mercedes ? Abonnées aux dernières places il y a deux mois et subitement jouant le Top 3.
Cela fait beaucoup de questions messieurs les responsables de la BOP. On n'est pas à l'école des fans (même s'il y a beaucoup de Martin en WEC avec Celia, Maxime et Aston), tout le monde ne doit pas gagner. Là vous avez fait n'importe quoi en balançant carrément les performances de Ferrari, Toyota et BMW à la poubelle. Il faudrait apprendre à doser, à bouger vos curseurs avec plus de finesse. Car il existe une grande différence entre dominer une course et la concurrence et se retrouver le meeting suivant à deux ou trois tours. Oui il fallait un peu couper les ailes de Ferrari. Non il ne fallait pas les empêcher de voler.
On n'est pas à l'école des fans
Comment peut-on encore charger Toyota qui n'est pas monté encore sur un podium cette saison ? Comment justifier que les BMW déjà à plus d'un tour l'an dernier à Interlagos et peu performantes au Mans comme à Spa étaient les plus lourdes sur le papier ? En GT3, les Ferrari n'avaient aucune chance, contrairement aux Porsche. Car si la N°92 n'a pu faire que limiter les dégâts en raison de son « success ballast », la N°85 Iron Dames des filles volait. Cela signifie que sans le poids dû à sa victoire au Mans, la Porsche Manthey se serait certainement battue devant. Donc maintenant on fait aussi une BOP en tenant compte du poids embarqué grâce aux victoires ?
Permettre à tout le monde d'avoir une chance de gagner n'est pas du tout la même chose que d'offrir un peu des victoires à tout le monde.
Imagineriez-vous un instant en F1 voir les McLaren terminer soudainement à deux tours à Francorchamps et les Ferrari signer le doublé ?
Au sein de l'ACO organisateur de ce très beau championnat, il faut vite rétablir l'équilibre. Non messieurs, Peugeot et Aston Martin ne doivent pas absolument monter sur le podium à Austin. Et oui on veut voir les Ferrari lutter pour les podiums et la gagne. Mais on a bien dit lutter. Entre une seconde devant tout le monde et une derrière, il y a un juste milieu à trouver rapidement pour qu'on arrête enfin de ne parler que de BOP. Car aujourd'hui on ne dit plus qu'un pilote, une équipe ou une marque est bonne. On dit qu'elle a une BOP. Et quand cela ne va pas, on met tout sur le compte de BOP. La vérité n'est pas là. Elle est au juste milieu. Il faut mettre le paquet, trouver les bons ingénieurs, impartiaux, pour mieux équilibrer les forces en présence, essayer de mettre tout le monde dans une fourchette d'une demie seconde. En sachant bien que la perfo sur un tour n'est pas égale à celle sur un relais. Car le poids a une influence sur l'usure des pneus, des freins, la consommation et même du comportement de la voiture et donc des réglages.
Une équation pas facile à résoudre certes, surtout avec autant de constructeurs. Et encore trois nouveaux qui arrivent. Mais attention, il faudra d'abord qu'ils fassent du bon travail et un bon proto avant de les mettre à niveau. Car la BOP ne doit pas permettre à une mauvaise auto, un team à la ramasse ou des pilotes en-dessous du niveau de ramener des trophées. C'est le principe de base du sport auto.
Sans une pénalité, Cadillac aurait eu un tour d'avance
Cela dit, on est ravi que Cadillac se soit imposé. Ce qui nous dérange c'est l'écart avec le second. Quasi une minute. Sans son « Drive Through » cela aurait été un tour d'avance sur tout le monde. Un peu fort le café, non ? Même si le fait qu'il n'y ait cette fois eu aucune voiture de sécurité a joué en faveur des leaders.
Tandis que les supporters brésiliens fans de Ferrari venus voir les protos dominant le championnat et Le Mans n'ont dû rien comprendre. Mais gare à ne pas prendre trop les fans, les journalistes et les autres teams pour des idiots. A ne pas casser le beau jouet.
Car aujourd'hui, la gestion de la BOP nous fait penser à de la bêtise (ou incompétence) ou de la politique comme on sait qu'il y en a beaucoup à l'ACO. Mais le public veut avant tout voir du sport, des batailles à couteaux tirés, des arrivées au finish et non pas des courses gagnées ou perdues d'avance, dès la publication du tableau de la BOP. Quand cela sera le cas, quand le job sera bien fait et la recette au point, alors promis on ne parlera plus de cette sacrée Balance de Performances. Et on savourera à nouveau les courses du WEC réunissant le plus beau plateau du monde. Et on mettra en exergue le dimanche soir ou le lundi l'incroyable relais d'un pilote, le bon travail d'une équipe et la force d'une marque. Mais aujourd'hui, tout cela n'est plus possible. Et qui sait si le pilote qui a fait la plus belles course hier n'est pas Robert Kubica, Antonio Giovinazzi, Brendon Hartley, Richard Lietz ou Augusto Farfus...


